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GLOBAL HUMANITY AND LEADERSHIP FOUNDATION, GHL-F

Leadership and Humanitarian Training for Leaders

LA PARTICIPATION CITOYENNE DANS LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES SEXUELLES : Outil du sensibilisateur de terrain.

INTRODUCTION

 

Cet article avait été publié pour la première fois en 2010. Nous avons désiré le mettre à la disposition du public pour encourager les sensibilisateurs dans la lutte contre les violences sexuelles sous toutes ses formes. Des mises jours peuvent être utiles au vue des jours qui passent, mais le viol restera le viol.

 

Bien que, ces dernières années, les droits  de l’homme soient devenus un trait dominant du discours international, le fait de parler de violences sexuelles et d’autres questions similaires provoque toujours réticence et embarras. Invariablement, les mêmes questions reviennent, y compris aux lèvres de ceux qui soutiennent l’idée de combattre les violences sexuelles : « Qu’entendez-vous par là ? » « Que voulez-vous dire par violences sexuelles » ? 

«  Que tout citoyen, doit participer à combattre les violences sexuelles»?

« Que faire si les deux parties parvenaient  à s’arranger à l’amiable »?

Ces doutes et interrogations peuvent être dus à un manque d’information et de compréhension. Ils peuvent aussi avoir un motif idéologique et coutumier. Quelle que soit leur origine, ils ne peuvent être ignorés. Lorsque les personnes qui les expriment manquent tout simplement d’information, y répondre fait partie intégrante du processus de sensibilisation et de familiarisation aux techniques de combattre les violences sexuelles. En revanche lorsque ces questions sont sous tendues par un point de vue idéologique et coutumier, y répondre participe d’un processus essentiel, d’affirmation d’un droit positif qui prime sur la coutume. Affirmer la théorie comme celle de la pratique du droit positif, même auprès des éventuels défenseurs de la coutume ou sceptiques, est un moyen important pour nous de renforcer notre analyse et notre compréhension du droit positif, et la façon  dont nous l’articulons vis-à-vis du droit coutumier.

 

Ce petit travail tente de répondre aux nombreuses questions de nos jours sur la lutte contre les violences sexuelles. Il a pour objectif de contribuer au rétablissement de l’ordre social actuellement en cours et d’encourager le développement de l’activisme visant à promouvoir et protéger les droits des victimes.

 

Ce article s’adresse prioritairement aux formateurs qui assurent ou souhaitaient assurer, la formation des militants dans le domaine des droits de l’homme, des personnes travaillant dans le domaine social, des membres d’organisations représentant les victimes, des représentants du ministère public, des autorités coutumières, voire d’autres personnes concernées par les questions des violences sexuelles. Nous espérons et attendons que les formateurs travaillant avec ces différents groupes pourront utiliser le contenu de ce manuel, et si nécessaire l’adapter et le développer ; pour mener des programmes de formation sur la lutte contre les violences sexuelles.

  • Structure du présent travail

Le présent travail est composé de trois parties distinctes : la première partie a trait aux violences sexuelles. Elle est composée des notions sur la violence sexuelle, les causes, le violeur, les moyens utilisés, et en fin les conséquences. La deuxième concerne le dualisme juridique congolais, en mettant un accent sur les faiblesses de la coutume dans la lutte contre les violences sexuelles. La troisième concerne la participation citoyenne active;  dans la lutte contre les actes de violences sexuelles. Elle prône certaines stratégies telles que la dénonciation, la participation à la recherche des preuves, la non protection des auteurs de ce crime,…

 

Nous ne prétendons pas devoir tout présenter sur les violences sexuelles, mais espérons que ceux dont l’expérience est plus solides en la matière, proposeront un manuel qui traitera de façon plus complète de ce qui a fait l’objet de la présente recherche.

CHAP I. LA VIOLENCE SEXUELLE EN DROIT POSITIF CONGOLAIS

 

SECTION I : NOTION SUR LA VIOLENCE SEXUELLE

 

§1.Définition

 

L’article 15 de la constitution de la IIIème République de la R.D. Congo ;

lutte contre les violences sexuelles.

 « -Les pouvoirs publics veillent à l’élimination de toutes les violences sexuelles ;

-Sans préjudice des traités et accords internationaux, toute violence sexuelle faite sur toute personne, dans l’intention de déstabiliser, de disloquer une famille et de faire disparaître tout un peuple est érigée en crime contre l’humanité puni par la loi»([1]).        

Le viol constitue une atteinte grave à la dignité humaine.

 

§2.Selon  l’OMS

 

La définition de l’OMS a été adoptée par le comité permanent organisation (CPI), qui en a fait la base des lignes directrices concernant les interventions relatives à la violence sexiste, dans une situation d’urgence, publiée en 2005([2]). Notons que cette définition n’est pas juridique :

« La violence sexuelle est tout acte sexuel, tentative pour obtenue un acte sexuel, commentaire ou avance de nature sexuelle, ou acte visant à un trafic ou autrement dirigé contre la sexualité d’une personne par la coercition, par toute personne indépendamment de sa relation avec la victime, dans tout contexte, y compris, mais sans s’y limiter, le foyer et le travail».

 

          Selon l’OMS, la violence sexuelle qui comprend le viol, se fait par toutes sortes d’actes sexuellement violents pouvant se produire dans différentes circonstances et environnement, notamment les suivants([3]) :

  1. Viol par le conjoint ou par un compagnon de sortie ;
  2. Viol par des étrangers ;
  3. Le viol systématique pendant un conflit armé ;
  4. Enfances non désirées, ou harcèlement sexuel, y compris relations sexuelles exigées en retour des faveurs ;
  5. Sévices sexuels infligés à des personnes souffrant d’un handicap mental ou physique ;
  6. Sévices sexuel exigés à des enfants ;
  7. Mariage ou cohabitation forcés, notamment le mariage d’enfants ;
  8. Refus du droit de recourir à la contraception ou de se protéger autrement contre les maladies sexuellement transmissibles;
  9. Avortement forcé ;
  10. Actes des violences contre l’intégrité sexuelle d’une femme, notamment mutilations génitales et détection obligatoire de la virginité;
  11. Prostitution forcée et traite d’être humains aux fins d’exploitations sexuelles.

On utilise souvent d’autres termes pour décrire un grand nombre d’actes du même type :

    • Violence sexiste (GBV – Gender-Based-Violence) ;
    • Violence sexuelle et sexiste (SGBV – Sexual and –gender-based-violence) ;
    • Violence contre les femmes (VAW-Violence against women)

On reconnaît en général que la violence sexuelle sévit dans le monde([4]), mais dans beaucoup de pays, il n’existe pas de mesure appropriées de prévention et de répression.

 

§3. Selon de Droit Positif Congolais

 

3.1. Des violences sexuelles

 

          Selon le code pénal congolais (Loi n°06/018 du 20 juillet 2006 modifiant et complétant le Décret du 30 janvier 1940, portant code pénal congolais, par viol , il faut entendre tout homme quel que soit son âge , qui aura introduit son organe sexuel , même superficiellement dans celui d’une femme ou toute femme quel que soit son âge , qui aura obligé un homme à introduire même superficiellement son organe sexuel dans la sien([5]).Le même code retient  comme moyens de commission de l’infraction du viol, les actes suivants([6]) :

  • Les relations sexuelles obtenues sur les personnes viables , soit à l’aide de :
    • Violences ;
    • Menaces graves ;
    • Ruse ;
    • La contrainte ;
    • La surprise ;
    • L’environnement coercitif ;
    • Avantage pécuniaire ;
    • Stupéfiant ;
    •   Par force ;
    • Pression psychologique ;
    • Arme.

Pour les vulnérables et incapables, en abusant de leur impossibilité et incapacité de se défendre par suite de : (Art. 170 al.1).

    • Débilité mentale ;
    • Maladie ;
    • Age ;
    • Etc.

Il ne suffit pas que les relations sexuelles aient été accomplies, mais la loi considère aussi :

  • Les pénétrations même superficielles dans l’organe sexuel ou tout autre partie du corps ou objet par tout homme dans l’une des  parties de la femme (bouche, anus,…) sans son consentement (art.170.a.b) ;
  • Tout rapprochement charnel de sexes commis sur  l’enfant de moins de 18 ans, ou une personne sans son consentement (art.167 al.1, 2 et art.170.d.3e).
  • Toute relation sexuelle, même sans violence, avec un enfant n’ayant pas atteint l’âge de 18 ans (art.167.al.2).

 

3.2. Des autres infractions de violences sexuelles

          La même loi classifie dans ce même cadre d’autres infractions des violences sexuelles. Il s’agit de :

  • L’excitation des mineurs à la débauche (art.172, 174 §2).
  • Du souteneur et du proxénetisme (art.174 b.).
  • De la prostitution forcée (art.174.c).
  • Du harcèlement sexuel (art.174.d).
  • De l’esclavage sexuel (art.A74.e).
  • Du mariage forcé (art.174.f).
  • Des mutilations sexuelles (art.174.g).
  • De la Zoophilie (art.174.h).
  • Du trafic et de l’exploitation d’enfants à des fins sexuels (art.174.j).
  • De la grossesse forcée (art.174.k).
  • De la stérilisation forcée (art.174.l).
  • De la pornographie mettant en scène les enfants (art.174.m).

([1] ) Constitution de la IIIè République de la R DCongo ; du 18 février 2006, Ed. LINELIT ; Kinshasa ; 2006,p.15.

([2] )OMS, Principes d’ethnique et de sécurité recommandés par l’OMS pour la recherche, la documentation et le suivi de violence sexuelle dans la situation d’urgence, ISBN, suisse, 2008 p.5.

([3] ) Idem.

([4] ) E.G. KRUG, Rapport mondial sur la violence sexuelle et la santé, OMS, Genève, 2002 (http:// www.who.int /violence injury prévention / violence/ world report / en / index. html, accession le 10 juin 2007).

([5] ) ONGS (UNIFEM, HCDH) ; Lois sur les violences sexuelles, Inédit, 2006. Fascicule 3.

[6] Art.170, 171,171bis, de la loi n°06/018.

Section 2.DES VICTIMES, AUTEURS ET LES CONSEQUENCES

 

§1. Les victimes des violences sexuelles

         

En analysant cette loi, les victimes sont regroupées en 5 catégories. Il s’agit de :

  • Personnes vivant avec handicap (fous, handicapés physiques, aveugles,… (art.171 bis.9) ;
  • Personnes vulnérables (vieux, malades,…) ;
  • Enfants mineurs (moins de 18 ans) ;
  •  Personnes adultes (subalternes, captives, ivrognes…) ;
  • L’animal,  dans le cas de la zoophilie (art.174.h.1e, 2e).

 

Ce qui comporte pour ces 5 catégories, c’est l’incapacité du discernement, l’impossibilité de se défendre, le manque du consentement, la peur des moyens que l’     auteur du viol utilise.

 

§2. Les auteurs et complices du viol

 

La même loi, a répertorié une série des auteurs du viol, en raison de leur autorité, au niveau social, familial, pouvant entraîner le vice du consentement ou l’entraînement du mineur dans la commission de l’acte, par manque du discernement ou moyen de refus. Il s’agit de ([1]) :

  • Ascendants ;
  • Descendants ;
  • Enseignants ;
  • Serviteurs ;
  • Militaires : policiers, tout homme armé ;
  • L’agent public ;
  • Personnel médical, para médical ;
  • Ministre du culte ;
  • Tradi - praticien ; assistants sociaux ;
  • Gardiens ;

Notons que ces derniers peuvent soit être auteurs directs, commandités, donneurs d’ordre, ou complices ([2]).

 

§3. Les conséquences (préjudice)

 

A. Conséquences physiques (corporelles)

 

          Il est rare qu’un acte forcé n’entraîne pas de conséquences graves. Ainsi, le législateur congolais a prévu des cas où les actes de violences sexuelles peuvent en produire. Il s’agit de ([3]) :

  • La mort (art.171 ; 174.g)
  • L’altération de la santé ;
  • L’altération des facultés ;
  • La perte de l’usage des sens ou de l’organe ;
  • L’infection sexuelle ;
  • La grossesse indésirable ;
  • La perte de la capacité biologique. (préjudices numéraux).

 

B. Conséquences morales

 

          Bien que le législateur congolais n’en n’ait  pas cité expressément, il en résulte des conséquences morales et psychologiques, à tout acte de violence sexuelle. Raison pour laquelle, la loi 06/018 du 20 juillet 2006 a prévu l’intervention du psychologue pour évaluer le préjudice psychologique, qui peut être lié au préjudice moral.

Citons quelques conséquences ([4]) :

  • L’aversion ;
  • L’angoisse ;
  • L’apathie ;
  • Le traumatisme ;
  • La claustrophobie ;
  • L’hypocondrie ;
  • La nervosité ;
  • Le complexe d’infériorité ;
  • Le mutisme ;
  • La rupture conjugale (divorce).

Parce que si les mesures urgentes ne sont pas prises, la victime peut recourir à d’autres moyens pouvant mettre sa vie ou celle des autres  en danger, il peut s’agir de :

  • Suicide ;
  • Vengeance ;
  • Meurtre ;
  • Incendie ;

C’est dans le cadre, qu’à part l’action des poursuites judiciaire faite à l’égard du coupable, il existe des actions de prise en charge psychosociale pour aider la victime à obtenir un équilibre psychologique. Les experts en prise en charge psychologiques ont proposé quelques pistes de prise en charge psychologique dont ([5]) :

  • L’approche systématique, c’est-à-dire qui tient compte de l’histoire de la vie de l’individu, sa personnalité, son environnement, l’appui social et la nature de l’événement traumatique connu ;
  • Mettre l’accent sur le rôle et critique du large contexte socioculturel où l’individu mène sa vie tout en étant traumatisé ;
  • Les séances d’écoute et de counseilling, en insistant sur le besoin de la victime afin de localiser la compréhension du trauma dans le contexte socioculturel ;

Ceci permet d’utiliser l’approche thérapeutique intégrative, combinant les principes psycho dynamique avec les interventions cognitives, comportementales pendant le traitement psychologique.

 

§3. Des poursuites judiciaires

  1. Mesures de l’administration de la justice

Pour éviter la lenteur et la complaisance durant la phase pré juridictionnelle et juridictionnelle, la loi n°06/019 du 20 juillet 2006, modifiant et complétant le décret du 06 Août 1959 portant code de procédure pénale congolais, a prévu différentes  mesures dans la poursuite du délinquant.

 Nous en citerons quelques-unes ([6]) :

  1. L’enquête

 L’enquête préliminaire en matière de violence sexuelle se fait dans un délai d’un mois, à partir de la saisine de l’autorité judiciaire (art.7 bis).

  1. L’instruction et le jugement
    • L’instruction et le prononcé du jugement se font dans un délai de 3 mois maximum à partir de la saisine de l’autorité judiciaire (art.7.bis).

c. Du huis clos

Le huis clos est prononcé sur la requête de la victime « ou du Ministère Public » (art.74 bis)

d. Le délai imparti à  l’ OPJ

  • L’officier de police judiciaire saisi d’une infraction relative aux violences sexuelles en avise dans les 24 heures, l’officier du ministère public dont il relève (art.7. bis).
  1. La réquisition à expert
  • L’officier du Ministère Public ou le juge requiert d’office un médecin et un psychologue, afin d’apprécier l’état de la victime des violences sexuelles et de déterminer les soins appropriés, ainsi que d’évaluer l’importance du préjudice subi par celle-ci, et son aggravation ultérieure (art.14. bis).
  1. La discrétion et la sécurité au cours de l’instruction

Le législateur congolais a prévue des mesures de discrétion pouvant entourer procès (exposés des motifs de la loi 06/019 du 20/07/06.

L’article 74 bis précise : « l’officier du ministère public ou le juge saisi en matière de violences sexuelles ; prend les mesures nécessaires pour sauvegarder la sécurité, le bien-être physique et psychologique, la dignité et le respect de la vie privée des victimes ou de toute autre personne impliquée ([7]).       

          Nous constatons que malgré la lenteur qu’accusent nos cours et tribunaux, le législateur n’a prévu que des mesures rapides dans toutes les phases du procès, en matière de violences sexuelles ([8]).

§2. Modes de répression

          Dans le cadre du renforcement de la répression des infractions aux violences sexuelles, des mesures ont été prises pour assurer la célérité dans la répression, de sauvegarder à celle-ci une assistance judiciaire. Il s’agit de ([9]).

  • La suppression du paiement de l’amende transactionnelle prévue pour éteindre l’action publique, en privilégiant la peine de servitude pénale principale ;
  • Les infractions relatives aux violences sexuelles sont « flagrantes » et donc la formalité d’informer l’autorité hiér          archique n’est pas requise avant toute arrestation du présumé coupable.
  • La peine varie entre 5 et 20 ans de prison selon les circonstances.

([1] ) Art.171. bis. 2-4.

([2] ) Art.172, 172, 174 .3° 

([3] ) Art.171 bis.

([4] ) DACO P., Les prodigieuses victoires de la psychologie moderne ; Ed. Marabout ; Limbourg /Verviers ; 1973 ; pp.256-279.

([5] ) CELPA BUKAVU, Violences sexuelles, atrocités traumatismes dus conflits armés et prise en  charge médico – psychosociale, inédit, Bukavu ; 2005, p.12.

([6] )    Art.7 bis de la loi 06/019 du 20/07/2006

([7]) Nous trouvons que certains procès vont jusqu’à faire 1 an avant qu’un jugement ne soit rendu.

([9] ) Exposés des motifs de la loi n°06/°019, du 20 juillet 2006.

CHAPITRE II: LA COUTUME DANS  LE DUALISME JURIDIQUE        CONGOLAIS FACE AUX VIOLENCES SEXUELLES

 

Le dualisme juridique Congolais, laisse une série d’interrogations sur la question des violences sexuelles, pour les personnes non avisées. Pour certains, en cas de violence sexuelle, l’autorité coutumière peut siéger et prioriser l’arrangement à l’amiable, au nom de la réconciliation communautaire. Pour d’autres, seule la juridiction pénale est compétente, en pareils cas. Il nous revient de voir la place de la coutume face à la loi et l’ordre public, et les faiblesses de la coutume face aux questions de violence sexuelles.

 

Le dualisme juridique congolais est confronté à un conflit entre le pouvoir coutumier et le pouvoir judiciaire quant aux sanctions à donner aux auteurs des violences sexuelles. Avec l’implication des ONG de défense de droits de l’homme sensibilisant sur la loi n° 06/018 et n° 06/019 du 20 juillet 2009, les autorités  coutumières s’y investissent progressivement.

 

Image 1: Juridiction pénale du droit positif

 

 

Image 1 : Juge coutumier

 

    
 

 

                  Nous verrons d’abord la place de la coutume face à la loi et l’ordre public congolais  (section I) puis les faiblesses de la  coutume congolaise dans la gestion des dossiers relatifs aux violences sexuelles (section 2). Ceci n’est pas une occasion de condamner le pouvoir coutumier, mais plutôt de montrer ce que les décideurs de la coutume doivent savoir au sujet de la loi sur les violences sexuelles

Section I. LA COUTUME FACE A LA LOI  ET L’ORDRE PUBLIC

§1. La coutume

    A. Définition

 

Selon GUILLIEN et VINCENT, la Coutume est définie comme une règle qui n’est pas éditée en forme de commandement par les pouvoirs publics, mais qui est issue d’un usage général et prolongé (répétitio) et de la croyance en l’existence d’une sanction à l’observation de cet usage (opinio necessitatis). Elle constitue une source du droit à condition de ne pas aller à l’encontre d’une loi ([1]).

B. Les éléments constitutifs de la coutume

 

On définit la coutume, comme étant un usage régulièrement suivi dans un milieu social donné d’une part et tenu pour obligatoire d’autre part ([2]).

Il y a une controverse sur la définition de la coutume. Plusieurs auteurs anglais et français définissent différemment la coutume. Chacun entend les mots dans un sens différent de celui qui les prononce. Certains coutumiers estiment  trop étroite la définition formulée par d’autres ([3]).

La définition la plus complète, est celle de Philippe WIELANT reprise par le Professeur GILISSEN : » la coutume est un droit non écrit, introduit par les usages et les actes continuellement répétés des membres de la communauté et dont on s’est servi publiquement, sans contradiction de la majorité du peuple, le nécessaire pour la prescrite » ([4]).

Cette définition compte 5 éléments.

  1.  Droit non écrit ;
  2. Droit introduit par les usages et les actes continuellement répétés,
  3. Usage dont on s’est servi en public ;
  4. Sans contraction de la majorité du groupe social ;
  5. Le temps nécessaire pour prescrire la coutume.

La coutume ainsi définie, est une des sources du droit.

§2.Au point de vue application face à la loi

 

Pour l’application, la loi est d’application générale, adaptée à des collectivités macro- sociales soit nationales soit même internationales ; elle est écrite et partant stable et précise ; elle est immuable et peu souple.

La Coutume est au contraire d’application locale souvent d’origine traditionnelle et familiale ; elle est toujours de portée restreinte.

Etant orale, elle est plus instable et imprécise. Elle est parfois conservatrice parce que traditionnelle et familiale. Elle est néanmoins adaptative au consensus social ([5]).

§3. Application face à l’ordre public

 

La coutume n’est pas seulement subordonnée à la loi, elle est également subordonnée à l’ordre public de l’Etat. Cela implique que la coutume cesse d’être applicable quand elle n’est pas conforme à l’ordre public de l’Etat. L’idée est que l’ordre public national doit l’emporter sur les diverses coutumes régionales ou locales ([6]).

Le champ d’application de cet ordre public, est le territoire de la République ([7]).

Comme cet ordre, selon le mémoire explicatif, ne serait pas limité à une région, il a le pouvoir d’éliminer et absorber toutes les règles impératives localement et régionalement déterminées par la coutume, qui contreviendraient à l’unité et à la nécessité sociales de l’Etat ([8]).

Rappelons en passant que la notion de l’ordre public fait allusion à l’ensemble des règles essentielles à l’organisation de la société, telle que le législateur la conçoit et auxquelles aucune convention ne peut déroger ([9]).

De tout ce qui vient d’être dit, nous pouvons déduire deux exigences à la coutume :

    • La coutume ne peut pas aller à l’encontre d’une loi ;
    • La coutume cesse d’être applicable quand elle n’est pas conforme à l’ordre public ;

Cependant il nous faudra répondre à une question importante : « Quand faut-il appliquer la coutume ? »

En tout état de cause, pour éviter le déni de justice, l’ordonnance du 14 mai 1886, qui a toujours force de loi, impose de juger les contestations d’après « les coutumes locales, les principes généraux du droit et l’équité », pour suppléer au silence de la loi ([10]).

Il est nécessaire de passer à l’analyse de certaines faiblesses qu’affichent certaines coutume, vis à vis des cas des violences sexuelles. Gardons en tête qu’au cas où une loi déclare les violences sexuelles d’infractions touchant l’ordre public, la coutume devrait céder place et ne pas favoriser toute convention dans le but de déroger à la loi.

 

Section 2. LES FAIBLESSES DE LA COUTUME FACE AUX VIOLENCES SEXUELLES

 

§1.Rôle traditionnel de la coutume

 

Après avoir analysé la place de la coutume dans le dualisme juridique congolais, il convient de rappeler que celle-ci n’a pas force à l’égard de la loi en vigueur. Nous donnerons quelques poches résiduelles des faiblesses de la coutume, en ce XXIè siècle.

Comme nous l’avons souligné en citant Mathieu KALENDA ; la coutume est fondée sur la tradition, l’expression de la sagesse des ancêtres. Cependant, considérer qu’il faut garder et appliquer aveuglement une coutume de 1840, qui trouble l’ordre public, ou qui viole la loi, serait de détruire la société, que nous sommes censés protéger.

Ex : Vers les années 1950, dans certaines coutumes rurales, les jeunes d’un village pouvaient s’organiser pour aller enlever une fille d’un village voisin, et l’emmener chez un jeune garçon qu’elle ne connaissait même pas. Sitôt que le garçon venait de la connaître sexuellement il lui était inconnu. Il était interdit à la fille de rentrer chez elle, c’était un tabou !

Notre société actuelle peut-elle admettre cela ? C’est un mariage forcé ! Une violence! La constitution de la IIIe République de la RDC, classe cet acte dans le cadre du mariage forcé : Art.40 « Tout individu a droit de se marier avec toute personne de son choix, de sexe opposé, et de se fonder une famille » ([11]).

C’est au regard de pareils actes, que le législateur Congolais a évolués dans sa mission de régulation de l’ordre public, par la formulation successives des textes de lois sur les violences sexuelles.

    • Le décret du 30 janvier 1940 portant code pénal congolais ;
    • Le décret du 06 août 1959 portant code de procédure Congolais, (Art : 7bis, 9 bis, 9 bis, 14 ter et 747 bis) ;
    • Loi n° 06/018 du 20 juillet 2006, modifiant et complétant le Décret du 30 janvier 1940 ;
    • Loi n° 06/019 du 20 juillet 2006, modifiant et complétant le Décret du 05 août 1959.

 

§2.Quelques faiblesses de la coutume

 

Parlant des faiblesses de la coutume ; précisons que, pendant que le législateur a évolué (de 1940-2006) ; certains partisans de la coutume continuent à traiter avec légèreté les faits condamnables par la loi pénale. Il s’agit notamment de :         

    • Mariage Forcé : prendre une fille par force, après l’avoir connu, les vieux du village se réunissent, vous amendent (3 bidons de boisson locale + 1 chèvre),  vous obligent de la garder pour épouse, c’est une violation de l’ art : 174, §6. de la moi 06/018 précité, et l’article 40 de la Constitution de la IIIè République de la R.D. Congo.
    • Le rapport sexuel avec les animaux (zoophilie) : ceux qui le commettent restent impuni. En cas de force majeur ils sont amenés chez le féticheur pour les laver de la guigne. C’est une violation de l’art  174.h. de la loi 06/018.
    • Certains hommes se déchargent sur les femmes pygmées prétendant obtenir la guérison de telle ou telle maladie. Ils restent impunis. C’est une violation de l’ art  174 i de la loi 06/018 de la loi précitée.
    • Certains vieux du village, au nom de la réconciliation communautaire se permettent de taire un cas de violences sexuelles.
    • Certains chefs coutumiers qui préfèrent l’arrangement à l’amiable en faisant prévaloir leur autorité coutumière, allant jusqu’à menacer des sanctions ceux qui pourront refuser sa décision.
    • Dans certaines coutumes, les rapports sexuels avec un fou sont sujets à des réprimandes orales sans aucune autre forme de sanction. C’est une violation de l’art  174 .c. de la loi 06/018 précitée.

Les exemples étant légion, précisons que toute autorité coutumière doit s’inspirer de la loi dès lors qu’il est en présence d’une affaire de violence sexuelle, sans oublier d’autres cas pénaux qui jadis revenaient à la gestion de l’autorité coutumière (voir chapitre I sur les violences sexuelles).

 


([1] ) GUILLIEN R. ; et VINCENT J ; Lexique des termes juridiques, Dalloz, Paris, 2003, p.177.

([2] ) CI. RENARD, Cours d’encyclopédie du Droit, PUL, 1960 fascicule 1èr n°.48. Voir aussi François GENY, Méthode d’interprétation et Source en droit privé positif, LGDJ, Paris, 1954 n°110.

([3] ) A. RUBENS, Les dimensions de la coutume, R. Jud. C., 1962, n°3 pp.44 et suivantes.

([4] ) J. GILISSEN, Introduction historique au droit civil, Presse universitaire de Bruxelles, Bruxelles, 1962 p.63.

([5]) KALENDA M ; Dans son étude sur «  l’évolution de droit coutumier » (publication UOC, 1961,p.36) estime qu’il se compose d’un exemple de règle qui traduisent le sentiment juridique commun des familles qui composent le clan et qui défendent et réprime tout acte contraire aux « BIJILA »(interdits relevant du droit pénal luba) et aux « MILAMBO » (règles obligatoires qui donnent, permettent ou interdisent) établis par la tradition. Le droit coutumier (issu de groupement familial) est donc fondé sur une tradition, expression de la sagesse des ancêtres, il est revêtu d’un cachet d’antiquité, qui lui donne à la fois sa valeur et son prestige.

([6]) CSJ/RDC, Bulletin des arrêts de la cour suprême de justice, Vol .II ; Ed. De la cour suprême de justice, Kinshasa, 1971, p.101.

([7]) Idem. P. 106.

([8]) Ibid.p.106-107.

([9] ) A. SOHIER ; Droit coutumier du Congo Belge,2è édition, Larcier, Bruxelles,1954,p.12.

([10]) B.O.189,.p.165

([11] ) Constitution de la IIIè République ; du 18 février 2006, Ed. LINELIT ; Kinshasa ; 2006,p.18.

CHAPITRE TROISIEME : DE LA PARTICIPATION CITOYENNE  A LA

                                  LUTTE CONTRE    LES VIOLENCES SEXUELLES

 

                        La participation désigne le fait de prendre part à, de coopérer, collaborer, être acteur dans une activité pour aider à l’obtention des résultats ([1]).De ce fait, tout citoyen doit apporter sa collaboration effective dans la lutte contre les violences sexuelles .Il s’agit notamment des :

  • Agents de l’ordre judiciaire (droit positif et coutumier)
  • Des agents de l’ordre extra  judiciaire.
  • Des victimes, témoins et membres de la famille

Faire participer la femme aux activités de sensibilisation, est une bonne pratique.(B) Les vieux sages du villages doivent contribuer à la lutte contre les violences sexuelles en informant les jeunes sur les limites de la coutume en matière pénale.
 

    
 

 

  

 

 

 
SECTION I. DES AGENTS DE  L’ORDRE JUDICIAIRE


                   

Le pouvoir judiciaire en tant qu’organe de l’Etat, possède une lourde responsabilité dans le maintien de l’ordre public. C’est d’ailleurs celui qui possède la mission de réprimer les actes des violences sexuelles.

Pour ce faire, il lui faut une véritable indépendance pour qu’il agisse en toute liberté .Le principe de la séparation des pouvoirs trouve sa raison d’être. Le juge indépendant ne peut accepter ou se voir imposer dans sa fonction juridictionnelle  la collaboration d’aucun autre organe du pouvoir extra – juridictionnel ni l’influence que pourraient exercer sur lui soit les parties soit d’autres justiciables ([2]).

                        Si l’indépendance est violée, le juge peut voir sa décision influencée en défaveur de la victime, de même comme il peut utiliser cette indépendance pour ne pas dire le droit en toute équité. La condamnation de l’auteur du viol et ses complices est en grande partie entre les mains de ceux qui sont sensés appliquer la loi. 

Pour ce faire, il existe certaines conditions qui doivent être réunies pour que l’action publique produise de bons résultats :

  • Travailler en toute indépendance,
  • Eviter la corruption et le trafic d’influence,
  • Prioriser la loi et sauvegarder le droit à un procès juste et équitable,
  • Eviter la lenteur délibérée,

Nous allons voir en passant, quelques responsabilités des agents de l’ordre judiciaire dont leur participation pour combattre les violences sexuelles.

 

 § 1 : DES COURS ET TRIBUNAUX

 

A. De la participation de l’OPJ

 

                        Dès lors que l’officier de Police judiciaire est saisi d’un cas de viol ; il doit éviter toute complaisance.

 

L’article 7 bis, de la loi 06/019 du 20 Juillet 2006, précise que : « L’enquête de l’office de police judiciaire est de portée immédiatement. Elle est menée sans désemparer de manière à fournir à l’officier du ministère public les principaux éléments d’appréciation » ([3]).

 

Il suffit que ce dernier ne travaille pas correctement dans les enquêtes pour que la situation change au profit de l’auteur du viol.

L’officier de police judiciaire saisi d’une infraction relative aux violences sexuelles; en avise dans les 24 heures l’officier du ministère publique dont il relève ([4]).

 

C’est très malheureux qu’un OPJ garde silence pour un dossier de violences sexuelles pendant un mois et plus en attendant la corruption.

 

                  Un autre problème alarmant ; se remarque quand les policiers envoyés à la recherche du violeur, font un arrangement  avec lui, rentrent et donnent le rapport à l’O P J, soit disant qu’ils l’ont manqué. C’est une autre manière de pérenniser l’impunité ; ils devraient plutôt refuser tout cautionnement de ce mal.

 

 B. De la participation de  l’ OMP

 

          L’officier du Ministère Publics détient des responsabilités sans partage dans la poursuite de l’infraction du viol. Il doit alors participer activement, par l’exercice des fonctions lui dévolues par la même loi, et les autres relatives à la compétence judiciaire.

Nous citerons :

  • Requérir le médecin ou le psychologue pour mieux apprécier l’état de la victime ([5]).
  • Prendre les mesures nécessaires pour sauvegarder la sécurité, le bien –être physique et psychologique, la dignité et le respect de la vie privée des victimes ou de toute autre personne impliquée ([6]).
  • Arrêter et accélérer la procédure  en faisant citer devant lui toute personne dont il estime l’audition nécessaire ([7]).

 

               Pendant la détention du prévenu, l’O M P doit éviter de céder à toute sollicitation allant dans le sens de faciliter la libération provisoire ; la perte des preuves et indices, de classer sans suite ou faire fuir l’auteur du crime en question.

 

C. De la participation du juge.

 

                   Le juge à son tour doit lutter pour décider en pleine conviction.

Il doit agir pour sauvegarder la justice équitable. N’oublions pas qu’une erreur  de sa part peut condamner l’innocent ou blanchir un violent au préjudice des victimes. Généralement lorsqu’un violeur est blanchi, libéré, la victime et leurs familles se sentent frustrés et demeurent dans une insécurité permanente. C’est la gestation d’une spirale de violence, soit par motif de vengeance par le violeur, pour effacer les traces, soit par la victime dans le but de se rendre justice, en retour du fait que le juge a échoué de condamner le coupable. C’est pour cette raison que le ministère public assiste à  toutes les audiences des cours et tribunal sauf dans les tribunaux de paix. Le ministère public  recherche  les infractions aux actes législatifs et réglementaires qui sont commises sur le territoire de la République .Il n’est jamais juge mais il poursuit et réclame l’application d’une peine demandée ([8]) ([9]).

§2. Participation du pouvoir coutumier

 

              Comme nous l’avions souligné précédemment, le dualisme congolais se heurte à certains problèmes dans la poursuite des auteurs des violences sexuelles. D’une par le Ministère public applique le droit positif et réprime fortement, pendant que le gardien de la coutume fixe les amandes et dommages intérêts, à titre de dot, puis lâche l’auteur du viol.

Sans revenir sur la théorie selon laquelle la coutume doit se conformer à la loi, nous donnerons quelques responsabilités que doivent les  gardiens de la coutume, lors de la poursuite des cas de violences sexuelles.

Il s’agit de :

  • Collaborer avec les agents de la justice en assurant le bien être des victimes qui ont dénoncé les auteurs des viols.
  • Prévenir les cas des violences  en insistant la loi 06/018 du 20 Juillet 2006, lors de leurs rencontres au BARZA, et manifestations coutumières, et pendant les cérémonies politiques ;
  • Aider la justice à rechercher l’auteur du viol lors qu’il a fui avant ou après l’arrestation;
  • Interdire tous leurs préposés et chefs locaux de relâcher ou cautionner un auteur de tels abus ;
  • S’abstenir de décider sur le cas de violences sexuelles, plutôt remettre l’auteur du viol entre les mains de la justice ;
§ 3. Des responsables politico militaires (parquets militaires)

 

Il est vrai que les agents disent qu’il n’existe pas de mauvaise troupe, mais des mauvais chefs. Cependant, nous n’allons pas ignorer que la plupart des agents et sujets commettent des viols sans être mandatés par leur hiérarchie. Malheureusement l’article 260 al. 3. du CCL III, selon le principe de la responsabilité des maîtres et commettants ; en raison de la responsabilité qu’ils avaient sur les gens sous son autorité ([10]).

Pour ce faire, dans le but de lutter contre la commission délibérée de ces actes, les responsables politico militaires doivent s’inscrire dans la logique de combattre ces abus par les actions suivantes :

  • Demander  aux organisations de défense de droits de l’homme de tenir des séminaires de renforcement des capacités, à l’endroit de leurs préposés, (militaires, policiers, agents…) travaillant sous leur autorité.
  • Assurer à la population civile de la protection en cas de dénonciation de ce que leurs sujets auront commis;
  • Autoriser les poursuites judiciaires à tout agent coupables et lui remettre à la justice le plus tôt ;
  • Toucher les questions de violences sexuelles, dans les parades  et rencontres régulières avec leurs préposés ; voire même  dans leurs discours politiques ;

 

SECTION 2 : DES AGENTS EXTRA JUDICIAIRE.

 

Les agents de l’ordre judiciaire nécessitent une participation effective des  agents des services extra judiciaires. Ces derniers fournissent des renseignements pouvant éclairer la  justice. Il s’agit de :

  • Médecin et psychologues ;
  • Les cadres et le personnel des organisations de défense des droits de l’homme ;
  • Responsables religieux,
  •  Tout le personnel qui participe aux enquêtes  comme expert ou non.

 

§1. DES EXPERTS DE PREMIER NIVEAU

 

A. De la participation des médecins et psychologues

 

Selon l’article 14 bis, de la loi n° 06/019, les médecins et les psychologues sont réquisitionnés  par le Ministère public, pour fournir les informations précises sur l’état de la  victime.

Leur rôle dans cette participation est de mettre leur expertise à la disposition de l’O M P pour indiquer le degré du dommage subi.

                    

 Il est nécessaire que ces derniers ne soient pas influencés  pour sous – évaluer ou sur évaluer le  dommage.

Leur expertise peut se révéler nécessaire pour donner des précisions sur : ([11]).

  • l’altération grave ou non de la santé ;
  • les séquelles physiques causées par l’acte ;
  • les séquelles psychologiques causées par l’acte (traumatisme, nervosité,……);
  • la mort de la victime (si la violence a été la cause directe);
  • la maladie sexuellement transmissible (VIH/SIDA, …..)
  • la grossesse,…

 

Le Professeur ERIC MARTIN, ancien président du CICR précise que, de l’attitude de l’équipe soignante, vis-à-vis du malade, dépend l’atmosphère, le climat de toute la maison. Il est nécessaire que la dignité du patient soit préservée et qu’on ne le considère plus comme un « objet » de diagnostic et de traitement, mais comme « un sujet ». Ce qui implique le respect de sa personne et de ses droits.  De là découle la nécessité du dialogue et de l’information, informer le malade nous paraît, non seulement un devoir, mais une nécessité psychologique impérieuse et indispensable. Il est nécessaire que les jeunes médecins soient familiarisés avec l’habitude de converser avec leur patient, qu’ils prennent le temps de les interroger qu’ils deviennent leurs inquiétudes et répondent à leurs questions ([12]).

B. De la collaboration des personnes participant aux en enquêtes

et organisations humanitaires

  1. Principes

                      Selon l’O M S, il existe des personnes qui peuvent participer aux enquêtes, il s’agit de (traducteurs, interprètes, personnel chargé d’entrer les données, les chauffeurs et autres) ([13]).

Toujours selon l’OMS, pour concevoir et exécuter une enquête sur les violences sexuelles, il faut comprendre la nature de la crise, et le contexte spécifique dans lequel l’enquête se fera, et garder à l’esprit les objectifs poursuivis. Le type d’information recueilli et les méthodes utilisées en  fonction de l’objectif de l’opération, ainsi que de la phase de crise et de son type ([14]).                      

 

Par exemple, les risques et les agresseurs seront différents dans les environnements différents (guerre, déplacement, fête, voyage, insécurité dans les quartiers, dans les services de l’administration publique,…).

 

Il existe  trois grands principes d’éthique qui devraient guider toutes les enquêtes portant sur les êtres humains (y compris les méthodes utilisées pour recueillir l’information) qui sont les suivants : ([15]).

  1. Respect des personnes,  principe qui a trais au respect de l’autonomie et l’auto détermination des participants, et à la protection de ceux qui ne sont pas autonome, notamment en leur offrant un abri contre les dangers ou les sévices
  2. Générosité, devoir de préserver le bien être des personnes des communautés impliquées, ce qui signifie réduire les risques au minimum et veiller à ce que les avantages soient supérieurs aux risques
  3. Justice, devoir de répartir équitablement les avantages et les charges

                      Le respect de ces principes a plusieurs conséquences importantes pour la collecte d’information.

 Par exemple, l’obligation de répartir les avantages qu’elle apporte exige qu’on examine soigneusement les points suivants ([16]) :

  • comment l’information sera utilisée ;
  • qui la verra ;
  • comment elle sera rapportée  et à qui ;
  • en vue de quel objectif elle sera rapportée ;
  • qui en bénéficiera et quand.

 

B. Les recommandations pendant la situation d’urgence

          Les guerres et conflits armés ont été à la base de beaucoup d’actes de violences sexuelles. Mener des enquêtes sur les violences sexuelles est une tâche très difficile en cette période.

   

Image : Population en déplacement pendant les conflits armés

 

 
  

 

Pendant la période des conflits armés, les populations en déplacement sont plus stressées et demandent plus d’attention qu ce soit de la part des humanitaires, que des pouvoirs publics. Les groupes armés et troupes régulières doivent recevoir plus de leçons pour respecter le droit humanitaire international et la loi sur les violences sexuelles.

 

L’OMS donne 8 recommandations sur la sécurité et éthique aux personnes chargées de mener les enquêtes sur les violences sexuelles en cas de situation d’urgence ([17]) :

 

1. Il faut que les enquêtés ou les communautés tirent plus d’avantages à communiquer des données sur la violence sexuelle qu’ils courent de risque ;

 

2. Il faut recueillir et enregistrer l’information de la façon qui présente du minimum de risques pour les enquêtes, selon une méthode solide, fondée sur l’expérience  et les bonnes pratiques actuelles ;

 

3. Il faut pouvoir compter sur place sur des soins et un appui de base pour les survivants victimes avant de commencer toute activité amenant des personnes à dévoiler des informations sur leur expériences ;

 

4. La sécurité et la sûreté de tous ceux qui participent à la collecte d’information étant primordiale, il faut y veiller en permanence, dans la situation d’urgence en particulier ;

 

5. Il faut protéger à tout moment la confidentialité due aux personnes qui donnent les informations ;

 

6. Il faut que quiconque fournit des informations donne son consentement éclairé avant de participer à la collecte des  données ;

 

7. Il faut que tous les membres de l’équipe de collecte des données soient sélectionnées avec soir et en reçoivent la formation spécialisée voulue en suffisance , ainsi qu’un soutien permanent ;

 

8. Il faut mettre en place des sauvegardes supplémentaires dans le cas où concerne les enfants (c’est-à-dire moins de 18 ans) doivent être le sujet de la collecte d’informations.

 

§ 2. De la participation des cadres des organisations de droits de l’homme

     A. Dénoncer et combattre la corruption

 

Les organisations de défense de droits de l’homme doivent dénoncer les pratiques de la corruption, de quelque sorte que ce soit. Elles peuvent fournir des renseignements pouvant décourager les corrompus et les corrupteurs. Il faut une sensibilisation de grande envergure.

 

 

   Image : Corrupteur et le corrompu en matière de violences sexuelles. 

 

B. Faire le lobby la sensibilisation et plaidoyer

                                                    

                     Outre le rôle que les organisation de défense des droits de l’homme dans la dénonciation de la corruption , elles jouent un rôle important dans la lutte contre les violences sexuelles .Il s’agit de :

  • sensibiliser la population sur l’attitude à prendre en situation d’urgence,
  • éduquer la population à dénoncer tout acte de violence sexuelle, ainsi que les complices et corrompus dans pareils dossiers,
  • éduquer les filles et femmes à se protéger selon les circonstances,
  • faire une longue diffusion des peines qu’encourent les auteurs des viols, dans le but de prévention,
  • faire le lobby et le plaidoyer auprès des responsables politico – administratives et militaires pour mieux encadrer leurs sujets
  • collaborer avec la justice pour accélérer les phases d’instruction pré juridictionnelle et juridictionnelle,
  • faire des rapports et statistiques sur la situation des violences sexuelles et autres violations des droits humains, ces rapports soumis au gouvernement pourront l’interpeller,
  • informer les bailleurs de fonds de l’état actuel sur terrain pour qu’il y ait une pression internationale sur les responsables politiques du gouvernement central,
  • aider les victimes à atteindre les instances judiciaires pour dénoncer, témoigner de ce qu’ils savent sur les auteurs des abus.

Aussi notons que la tâche des organisations de défenses des droits de l’homme, est de veiller à la sensibilisation et l’information de la masse populaire et gardiens de la coutume, sur les prescrits de la loi n° 06/018 du 20 juillet 2009.

 

§ 3. De la participation des responsables religieux

                      Ces derniers, jouant le rôle  d’encadreurs spirituels, doivent contribuer à éduquer la population fréquentant les cultes. Inclure dans leurs prédications des séquences sur les violences sexuelles et des conséquences que cela peut causer aux victimes et auteurs ([18]).

Dans le cadre hospitalier, la responsabilité de  l’aumônier est peut être d’abord, de rappeler au malade qu’il reste malgré les détériorations et les mutilations que son corps subit, une personnalité à part entière. Dans un dialogue simple et tendu, dans une écoute surtout qui permet au malade de s’exprimer, il peut jouer un rôle non négligeable dans la thérapie hospitalière. L’aumônier peut enfin établir les liens, non seulement avec le personnel soignant, mais avec la famille et la paroisse du malade et préparer ainsi sa convalescence et son retour à la maison ([19]).

 


([1] ) REY A. Le Robert micro poche ; Dictionnaire ; Ed. ISBN, Paris, 1994, p.905.

([2] ) CSJ .De la participation du Ministère Public près la Cour Suprême de Justice au délibéré de la Cour, Ed. de la CSJ, Kinshasa, 1968,p.33.

([3] ) Art.7 bis, de la loi 06/019 du 20 juillet 2006.

([4] ) Art. 14 bis, de la loi 06/019 du 20 juillet 2006.

([5] ) Idem.

([6] ) Art. 74 bis, de la loi 06/019 du 20 juillet 2006

([7] ) Art. 15 et 16 de la loi 06/019 du 20 juillet 2006

([8] ) A. VITU  et MERLE, Procédure pénale, PUF, Paris, 1989 ; pp.49-54.

([9] ) CSJ, Op. Cit. .p.34.

([10] ) Art.  260.al.3   du   Décret du 30 juillet 1888 portant livre des obligations conventionnelles, in, Piéron Piron et Jacques Devos, codes et lois du Congo –belge, Tome 1, Ferdinand Larcier, Bruxelles ; 10960 (Code Civil Congolais, livre III)

([11] ) Art 171 bis, 8° ; et 171 bis  de la loi du 06/019 du 20 juillet 2006.

([12] ) CICR, Rendre l’hôpital plus humain , Ed.Inst.Henri Dunant ; Genève, pp.33-35.

([13] ) OMS , Op.cit., p.4.

([14] ) Idem, p.7.

([15] ) The National Commission of the protection of human subjects of biomedical and Behavioural Research . The Belmont Report :Ethical principles and guidelines for the protection of human subjects of research Bethesda , MD, Office of human subjects of research , National Institute of Health 1979

( http://ohsr.od.nih.gov/guidelines/accession, du 10 juin 2007)

([16] ) OMS, Op. cit.,p.8.

([17] ) Idem, p.9.

([18] ) LOUIS SECOND, La sainte bible ; Ed.ISBN, (Genèse 34 :1-24)

[19] CICR ; Op cit . pp.34-35

Section III DU ROLE DES VICTIMES, TEMOINS ET PROCHES FAMILIERS

 

Dans la lutte contre les violences sexuelle, les victimes, témoins et proches familiers jouent un rôle important. Ils peuvent faciliter au Ministère Public la tâche dans l’administration de la justice.

§1 De la participation des Victimes

 

Les victimes des violences sexuelles peuvent aider la justice à poursuivre les auteurs en apportant leur collaboration honnête et efficace. Ils doivent éviter d’être dupé par les auteurs qui  leur promettent des faveurs pour qu’ils taisent la situation. Par ailleurs, nous déplorons quelques cas où les victimes sont séduites à designer d’autres personnes autres que  les vrais auteurs de ces abus. Cette situation se montre souvent dans des cas des violences faites par les ascendants et membres proches de la famille.

Seule la victime peut dire la vérité sur : l’auteur, le lieu, la date, les circonstances, son antériorité avec l’auteur, ce qu’il ressent en elle après le viol,…

§2 De la participation des témoins et membres proches

 

Les violences sexuelles se font la plupart de fois dans les circonstances obscures, en plein air comme les hostilités (conflits armés). Cependant, il arrive qu’il y ait des personnes qui peuvent avoir été informé, vu, entendu de la victime, ou les avoir surpris et sauvé la victime. Leur rôle est de participer à l’administration de la poursuite. Ils peuvent :

    • Eviter de stigmatiser la victime ;
    • L’aider à poser sa plainte ;
    • Empêcher l’auteur de l’acte, de fuir et se soustraire à la justice ;
    • Témoigner avec honnêteté, de ce qu’ils savent sur le cas ;
    • Apporter un appui moral et la discrétion, en évitant de propager la nouvelle ;
    • Dénoncer l’acte et participer à la collecte des informations supplémentaires ;

 En conclusion, nous dirons que la participation citoyenne veut que  tout individu en tant que citoyen dans la fonction qui lui est dévolue, de mettre à la disposition de la justice sa compétence et sa capacité pour combattre les violences sexuelles.

CONCLUSION

Le problème des violences sexuelles n’est pas à négliger au vue du choc et des autres conséquences qu’il cause. Les organisations et autorités nationales dans leur lutte ont besoin de la grande participation citoyenne de tout le monde. Le rétablissement de l’ordre social demande des efforts et un activisme visant à promouvoir et protéger les droits des victimes. La formation en ce domaine devrait prendre ne compte un grand nombre des femmes comme intervenants. De plus, les participants devraient être des décideurs comme OPJ, Chefs coutumiers, leaders religieux, auxiliaires de la justice, pour faire un rebalancing du dualisme juridique congolais. Comme chaque milieu a ses spécificités coutumières en matière de mariage, une étude préalable s’avère nécessaire avant toute sensibilisation. Nous ne prétendons pas avoir tout présenté sur les violences sexuelles, mais espérons que ceux dont l’expérience est plus solides en la matière, proposeront un manuel qui traitera de façon plus complète de ce qui a fait l’objet de la présente recherche.

BIBLIOGRAGRAPHIE SOMMAIRE

 

I.TEXTES DE LOI

 

-Constitution de la IIIè République ; du 18 février 2006, Ed. LINELIT ; Kinshasa ; 2006.

 

-Décret du 30 juillet 1888 portant livre des obligations conventionnelles, in

 Piéron Piron et Jacques Devos, codes et lois du Congo –belge, Tome 1, Ferdinand Larcier, Bruxelles ; 10960 (Code Civil Congolais, livre III)

 

II.OUVRAGES

 

-A. VITU  et MERLE, Procédure pénale, PUF, Paris, 1989.

 

-A. RUBENS, Les dimensions de la coutume, R. Jud. C., 1962, n°3.

 

A. SOHIER ; Droit coutumier du Congo Belge, 2è édition, Larcier,

Bruxelles, 1954.

 

-DACO P., Les prodigieuses victoires de la psychologie moderne ; Ed.

 Marabout ; Limbourg /Verviers ; 1973.

 

E.G. KRUG, Rapport mondial sur la violence sexuelle et la santé, OMS,

Genève, 2002.

 

-GUILLIEN R. ; et VINCENT J ; Lexique des termes juridiques, Dalloz, Paris,

2003.

 

-François GENY, Méthode d’interprétation et Source en droit privé positif,

 LGDJ, Paris, 1954.

 

-J. GILISSEN, Introduction historique au droit civil, Presse universitaire de

Bruxelles, Bruxelles, 1962.

 

-KALENDA M ;  L’évolution de droit coutumier » UOC, Kinshasa, 1961.

 

-LOUIS SECOND, La sainte bible ; Ed.ISBN. 1980.

 

 -OMS, Principes d’ethnique et de sécurité recommandés par l’OMS pour la

recherche, la documentation et le suivi de violence sexuelle dans la situation d’urgence, ISBN, suisse, 2008.

 

-RENARD, Cours d’encyclopédie du Droit, PUL, 1960  fascicule 1èr n°.48.

 

-REY A. Le Robert micro poche ; Dictionnaire ; Ed. ISBN, Paris, 1994.

 

III.REVUES

 

-CSJ .De la participation du Ministère Public près la Cour Suprême de

Justice au délibéré de la Cour, Ed. de la CSJ, Kinshasa, 1968.

 

-CICR, Rendre l’hôpital plus humain, Ed. Inst.Henri Dunant; Genève; 1998.

 

 

-CELPA BUKAVU, Violences sexuelles, atrocités traumatismes dus conflits

armés et prise en  charge médico – psychosociale, inédit, Bukavu ; 2005.

 

-CSJ/RDC, Bulletin des arrêts de la cour suprême de justice, Vol .II ;

 Ed. De la cour suprême de justice, Kinshasa, 1971.

 

-ONGS (UNIFEM, HCDH) ; Lois sur les violences sexuelles, Inédit, 2006.

Fascicule 3.

 

IV.WEBOGRAPHIE

 

-http:// www.who.int /violence injury prévention / violence/ world report / en / index. html, accession le 10 juin 2009).

 

 -http://ohsr.od.nih.gov/guidelines/accession, du 10 juin 2009

 

 

 

 

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